Les « 24h du le Sport Féminin » sont organisés dans le cadre d’un partenariat entre le Ministère en charge des Sports, le CSA (Conseil Supérieur de l’Audiovisuel), le CNOSF (Comité National Olympique du Sport Français) et Femix’sports. À cette occasion, des compétitions féminines, des conférences et de nombreux reportages TV et radio sont programmés sur le sujet (Programme sportif).
CIALFI souhaite se saisir de cet évènement pour poursuivre et partager ses réflexions sur le développement et la promotion du Sport Féminin. Un engagement qui fait notamment suite à la présence de Sophie et Coralie à la conférence « Femme, Sport et Médiatisation : pour une couverture plus importante du Sport Féminin », organisée par Think Tank Sport&Citoyenneté du 27 novembre 2013 au CNOSF.
A cette occasion nous avons interrogé plusieurs sportives de haut-niveau amateur et professionnel pour raconter leur expérience personnelle et donner leur avis sur la question des 24h du sport féminin. Bonne lecture !
> Être sportive dans la société contemporaine
Que représente le sport pour toi ? Comment y es-tu venue ?
- Clémence HALBOUT : Le sport fait vraiment partie intégrante de mon quotidien, et contribue à « mon équilibre ». Sans le roller, il y a un manque, un vide. C’est aussi une fierté je pense de pratiquer à haut niveau. J’ai commencé le roller à l’âge de 3 ans à l’école maternelle, notre entraîneur de club passait dans les écoles pour un apprentissage. De plus, ma grande sœur pratique ce sport à haut niveau depuis toute petite aussi, cela m’a donné envie de poursuivre.
- Lotta SCHELIN : Le sport est ma vie. Il représente tout : la joie, l’engagement, le partage et l’apprentissage de la vie en groupe, l’amitié, la responsabilité et la passion. Le sport unit, c’est sa qualité essentielle. Mon Père était professeur de sport et on jouait beaucoup à la maison. Ma sœur a commencé à jouer au foot à l’âge de six ans et je voulais la suivre dans cette voie.
- Coralie DUCHER : Le sport est un ensemble de challenges, d’objectifs constants physique et mental, mais aussi une pratique qui nous enseigne des valeurs et méthodes personnelles tel que la gestion de stress, l’épanouissement de soi même, la confiance en soi, tout en étant ludique et plaisant. Plus passionné par les sports collectifs (basket ou football) avec ballon que par la marelle ou le saut à l’élastique lors des récréations, je me suis dirigé peu à peu vers la pratique du football (étonnant vu qu’aucune personne de ma famille proche pratiquait ou suivait ce sport).
- Laetitia GRAND : Le sport c’est se faire plaisir, rencontrer de nouvelles personnes, avoir un bon état d’esprit…J’ai connu le rugby, en allant voir les matches de rugby masculin de ma ville.
- Aurélie KACI : Le sport est un moyen de déstresser, de se transcender, d’évacuer, de se vider l’esprit. C’est ludique. Ma famille fait du sport, en particulier mes deux grands frères qui se sont mis au foot. J’ai suivi.
- Marinette PICHON : Un partage, échange, et le dépassement de soi mental et physique. J’y suis simplement venue en voyant des jeunes de mon club pratiquer le football sur le terrain municipal de Brienne le Château, j’ai été immédiatement attirée. J’ai débutée à l’âge de 5 ans avec les garçons.
Quel est ton statut sportif actuel ? Comment concilies-tu « temps sportif », « temps professionnel » et « vie personnelle » ?
- Clémence HALBOUT : Je pratique un sport amateur, assez peu reconnu aujourd’hui. Pourtant, je passe plus de 20h à l’entraînement par semaine. J’ai réussi à dédoubler mon année de Master 2 afin de pouvoir concilier sport et études grâce à mes responsables de fac. J’ai donc la possibilité de mixer les deux activités, malgré un emploi du temps assez chargé. En revanche nous avons peu de temps à consacrer aux loisirs avec la charge d’entraînement, les compétitions, et le repos nécessaire. Il est parfois un peu difficile de l’accepter car nous sommes en décalage par rapport aux autres étudiants.
- Lotta SCHELIN : Je suis professionnelle. Je m’entraîne une à deux fois par jour pour une durée d’une à deux heures, donc cela me laisse du temps pour voir ma famille et mes amis.
- Coralie DUCHER : Retraitée mais ancienne joueuse professionnelle , les structures dans lesquelles je suivais ma scolarité ou mon job me permettaient d’avoir des horaires adaptés ou organisés en fonction de mes entrainements et jours de match. Cependant une fois professionnelle, cela devient beaucoup plus simple et permet d’organiser son temps afin de profiter de sa famille et autre passe temps.
- Laetitia GRAND : J’ai un statut amateur, je travaille la semaine et je m’entraine 3 fois par semaine. En plus le staff de l’équipe de France nous donne des exercices à effectuer en dehors des entraînements avec mon club. Donc, je m’entraine, tous les jours. Je n’ai pas beaucoup de vie personnelle, à vrai dire, mais j’essaye de trouver un peu de temps quand même car la famille et les amis(es), c’est important.
- Aurélie KACI : Je suis professionnelle. Nous avons beaucoup de temps libre donc je n’ai aucune difficulté à concilier temps de travail et temps personnel.
- Marinette PICHON : Retraitée, je continue de m’entretenir en faisant une séance d’Urban foot par semaine et je cours à plusieurs reprises dans la semaine durant le temps de midi et de la musculation.
Quels sont les principaux obstacles rencontrés au cours de ta carrière ?
- Clémence HALBOUT : Les études, je ne sais pas si on peut parler d’obstacles, mais en tout cas, notre sport ne permet pas d’être professionnel, il faut donc faire des études. Et le temps consacré aux études est énorme; la possibilité d’entraînements étant moindre. Il est donc difficile de rivaliser avec les nations pro en roller. J’ai aussi eu des périodes de grosses blessures (notamment un traumatisme crânien), ce qui m’a poussé a arrêté pendant plus de 6 mois. Enfin, le manque de budget empêche souvent de pouvoir faire de grandes compétitions et prendre ainsi plus d’expériences. Les déplacements coûtent chers, ainsi que le matériel qui est à renouveler tout le temps.
- Lotta SCHELIN : Il y a eu quelques blessures et des périodes où je me sentais moins bien. Mais le plus gros obstacle à mon avis est de toujours devoir défendre le foot féminin. Et pour que le foot féminin soit médiatisé il faut être très accessible.
- Coralie DUCHER : Les principaux obstacles rencontrés sont mes deux graves blessures aux genoux dont une qui m’a fait arrêter le football définitivement. S’en suit l’épreuve de la reconversion, le retour à un rythme normal, le manque d’information et de structure de soutien.
- Laetitia GRAND : Je n’en ai pas trop rencontré si ce n’est ma dernière blessure, qui m’a privé de la tournée de novembre avec l’équipe de France, et de 2 matches importants avec mon club.
- Aurélie KACI : Mon mental peut parfois me faire défaut, les cours de BTS et les blessures.
- Marinette PICHON : La mixité, le manque de structures adaptées pour les jeunes joueuses.
> Les 24h du sport féminin donnent-ils des « elles » ?
Quel est ton avis sur le déroulement des « 24h pour le sport féminin » le 1er février prochain et que penses-tu de la programmation ?
- Clémence HALBOUT : Je trouve vraiment bien de consacrer un peu de place dans les médias au sport féminin. Il est clair qu’habituellement les femmes sportives sont quasi-inexistantes à la télé… Leur dédier 24h de programmes est donc vraiment valorisant. En revanche, ce sont toujours des sports connus qui sont diffusés. J’aimerais voir un jour du roller sur France 2! En espérant que ces 24h feront bouger les choses, et qu’à terme, le sport féminin soit valorisé au même titre que le sport masculin.
- Lotta SCHELIN : C’est toujours bien pour le sport féminin d’être valorisé et mis en avant.
- Coralie DUCHER : Un intérêt considérable et une programmation complète qui je l’espère mobilisera un large public, et la mise en avant de différentes pratiques féminine.
- Laetitia GRAND : C’est une très bonne idée, pour dire qu’il n’y a pas que le rugby masculin qui doit être télévisé. Il y a aussi le rugby féminin et toutes les autres sélections.
- Aurélie KACI : Une programmation intéressante et complète et le plaisir à voir le sport féminin mis à l’honneur.
- Marinette PICHON : Un dispositif important et cohérent avec des divers champs d’intervention et de documentaires, des matchs féminins en direct comme Football et Rugby mais aussi des questions portant sur le sport féminin lors des différents jeux, etc. J’espère que les téléspectateurs et téléspectatrices seront au rdv !
Souhaites-tu suivre tout particulièrement les compétitions et reportages diffusés à cette occasion (TV, radio, presse) ? Participes-tu toi-même à la journée (compétition, évènement particulier, etc.) ?
- Clémence HALBOUT : Ma fédération participe aux 24h du sport féminin à l’occasion du championnat de France Indoor ce même week-end. Malheureusement, je ne pourrais y participer car je suis blessée depuis un moment et n’ai pas pu remettre les rollers depuis 3 mois… en revanche si je n’y vais pas en tant que spectatrice, je les regarderais en live.
- Lotta SCHELIN : J’aimerais bien les suivre à la télé.
- Coralie DUCHER : Etant consultante sur la chaine de l’Olympique Lyonnais lors des matches de football de l’équipe féminine, je suivrai en direct le match ARRAS / OL en championnat de D1.
- Laetitia GRAND : Je serai avec les bleues, le 1 février à Grenoble, s’il nous en est donné l’occasion bien sûr !!!
- Aurélie KACI : Je souhaite suivre le match de football féminin Paris SG – Montpellier. Il n’est pas sûr que je puisse y participer du fait que je sois blessée.
- Marinette PICHON : Je serai évidement ravie de participer avec Fabien LEVEQUE lors du match qui opposera l’équipe du PSG à celle de Montpellier sur France 4 pour le compte de la 15ème journée du Championnat de France. Je participerai également à un débat le vendredi 31 janvier sur les ondes de Radio France avec notamment la présence de Marie-Georges BUFFET.
> L’organisation du sport féminin au quotidien, ça donne quoi ?
Ta fédération, ton club et/ou les structures sportives que tu as fréquenté / tu fréquentes ont-elles adopté des dispositifs pour le développement et la promotion du sport féminin ?
- Clémence HALBOUT : Non pas vraiment. Il n’y a pas de dispositif spécifique mis en place par la Fédération Française de Roller, à part cette année avec la participation aux 24h du sport féminin. C’est peut être un premier pas vers une nouvelle politique spécifique en faveur des femmes.
- Lotta SCHELIN : La Fédération suédoise de football travaille beaucoup pour l’égalité entre hommes et femmes. Et le foot féminin est reconnu depuis longtemps, c’est un des sports n°1 en Suède. L’Olympique Lyonnais a mis en place le même principe de formation que chez les garçons. Certaines joueuses se rendent également dans les écoles pour promouvoir le foot féminin auprès des jeunes filles et leur donner envie de rejoindre les clubs.
- Coralie DUCHER : Le plan de féminisation de la Fédération Française de Football. Et la mise en place de contrats fédéraux (pro) permettant de vivre de sa pratique.
- Laetitia GRAND : Oui la Fédération Française de Rugby a fait des progrès sur les retransmissions de match et organise la Coupe de Monde en France !!! Il y aura également un match du tournoi* France-Irlande à Pau. [*Tournoi des 6 nations]
- Aurélie KACI : Oui, par le développement de sections sportives féminines, par la possibilité de jouer dans les grands stades et l’organisation de différents événements lors de matchs afin d’augmenter le nombre de spectateurs.
- Marinette PICHON : Oui un plan de féminisation via la FFF à déjà œuvré dans ce sens et s’élargit aux clubs avec une volonté de développement individuel et collectif fédéré par la FFF.
Te considères-tu engagée / impliquée dans le développement et la promotion du sport féminin ? Si oui pourquoi et comment ?
- Clémence HALBOUT : Oui, en travaillant dans le développement durable dans ma formation, en étant sportive de haut niveau et qui plus est, dans un sport amateur, je suis obligée d’être impliquée sur cette thématique. En revanche, j’aimerai avoir plus de temps à consacrer pour pouvoir monter des projets de promotion du sport féminin… Mais les contraintes sportives sont lourdes, et il est difficile pour moi de m’impliquer dans plusieurs projets à la fois. C’est par contre une cause que je souhaiterais défendre par la suite.
- Lotta SCHELIN : Oui au quotidien. En tant que joueuse, je participe à la médiatisation, au développement et à la promotion du foot féminin, à la fois sur et en dehors du terrain.
- Coralie DUCHER : Oui, par ma reconversion dans le marketing sportif où je suis chargée du développement du football féminin au sein du French Soccer Institute (FSI).
- Laetitia GRAND : Je ne bénéficie pas assez de temps libre dans la saison régulière, mais s’il y a des structures pour représenter le rugby féminin pourquoi pas faire quelque chose, je pense notamment à aider les Ecoles de Rugby.
- Aurélie KACI : Je ne me considère pas engagée dans le développement et la promotion du sport féminin autrement que par mon statut de joueuse, mais je le soutiens.
- Marinette PICHON : Oui à travers mon emploi au sein du club du FCF Juvisy Essonne et en dehors de manière personnelle en essayant de militer en partageant mon expérience et vécu de ma carrière. Mais aussi au travers des échanges avec les plus jeunes lors de journées dédiées au football féminin ou au sport féminin sous toutes ses pratiques !
Comment perçois-tu le rapport entre section masculine et section féminine au sein de ta fédération / de ton club ?
- Clémence HALBOUT : On a parfois l’impression d’être moins prises en compte, qu’on nous accorde moins de confiance et moins d’attention qu’aux garçons. De plus, certains propos, que ce soit sur les performances ou la facilité de nos courses par rapport à eux, peuvent être, à répétitions, énervants et dévalorisants.
- Lotta SCHELIN : Il y a toujours une grande différence entre les hommes et les femmes au niveau salarial. En revanche, la fédération suédoise et l’Olympique Lyonnais tentent d’homogénéiser les moyens et les conditions d’entraînement. Il faut donc continuer à travailler dans ce sens.
- Coralie DUCHER : Malgré un fort développement du sport féminin notamment celui du football féminin, il reste un fossé sur les plans notamment médiatique, financier et marketing (sponsors).
- Laetitia GRAND : Il est plus facile de cotoyer les garçons de notre club que ceux qui sont sélectionés en équipe de France. Avec ceux de mon club nous nous voyons régulièrement donc le contact est facilité. Avec les joueurs de l’équipe de France nous nous rencontrons très peu, mais l’approches est tout de même relativement bonne.
- Aurélie KACI : Le budget, les médias et des personnes en général moins impliqués. Mais le football féminin connait un développement très fort par rapport aux autres sports.
- Marinette PICHON : Un fossé s’est creusé depuis toujours, en raison d’une part, même après de grand efforts entrepris par les Fédérations diverses. Les hommes ont souvent polarisé la lumière, prenons l’exemple du basket, ou encore du football. D’autre part il reste à travailler sur des aspects majeurs tels que la médiatisation, la professionnalisation de la pratique, les structures sportives et les sponsors financiers.
Aurais-tu des remarques, observations ou pistes de réflexions permettant le développement et la promotion du sport féminin ?
- Clémence HALBOUT : Je pense que la plus grosse part du travail est dans le changement des mentalités, l’acceptation de l’égalité des sexes, et de la génétique humaine. Une grosse avancée doit se faire dans l’analyse et l’accompagnement des femmes sportives à tout âge, comprendre la psychologie féminine, être attentif aux spécificités des filles, des femmes…D’autre part, la médiatisation peut largement contribuer à valoriser la femme, si l’on met sur un pied d’égalité la diffusion de programmes féminins et masculins, et que l’on valorise des performances féminines… Mais cela n’est possible qu’avec un changement des mentalités.
- Lotta SCHELIN : Le sport est le reflet de notre société, alors pour faire avancer le sport féminin il faut avant tout faire évoluer les mentalités.
- Coralie DUCHER : Des réflexions à avoir sur les orientations et les possibilités pour les joueuses sortant d’un pôle sportif : elles doivent souvent choisir entre leur vie professionnelle et leur pratique sportive, faute de contrat pro dû à une situation financière de leur discipline ou club ne le permettant pas.
- Laetitia GRAND : Oui, pour que le rugby féminin soit plus populaire, il faut que les médias (radios – presse – télévision) s’intéressent à notre sport. Cela passe dès maintenant pour nous les filles par gagner le Tournoi des 6 Nations, préparer la Coupe de Monde qui se déroule chez nous et avoir le meilleur résultat possible. L’idéal serait d’être Championne du Monde de Rugby Féminin, c’est le vœu de toutes joueuses de rugby, et bien entendu de l’Equipe de France.
- Marinette PICHON : Offrir dans un premier temps au grand public qui ne connait pas le sport féminin en général et ses pratiques des fenêtres d’expositions plus importantes sur des chaînes gratuites et non payantes, pour ne pas limiter les accès. Puis travailler sur des tables rondes réunissant les « Hommes et Femmes » pour débattre et trouver ensemble des orientations sur les axes de progression du développement et cesser de croire que l’argent fait la beauté du sport !
Nous remercions très chaleureusement les filles pour leur participation ! Et Vive le Sport Féminin, sous toutes ses formes ! 🙂
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